Irma
11 September 2017
Celà fait trois semaines que je passe mon temps sur NOAA, observant les dynamiques nuageuses du golfe du Mexique et des Caraïbes. Même si statistiquement, il y a peu de risque qu’un nouvel ouragan ne vienne s’abattre à l’emplacement même dévasté par Matthew l’an dernier. Et José vient de nous prouver qu’un ouragan pouvait en cacher un autre.
Il y a deux semaines en arrière, nous effectuons notre visite à Roseaux et en profitons pour une petite baignade dans la rivière du même nom. L’occasion pour les enfants du lieu d’apprendre à nager. L’eau n’y était pas super belle cette fois-ci, avec des choses flottantes en deux eaux. Pas grave. Nous avons ensuite mangés là, le fameux poisson de Madeleine, dite Madou.
Lendemain, jogging à la fraîche en partant de la maison, descente dans le bidon-ville, traversée de la décharge puis retour par Fond Rouge derrière qui nous ramènera sur les hauts de Jérémie. Il faut chaud, le chemin est, commme habituellement en Haïti incertain. Le plus souvent, le chemin n’est pas sur la carte,et parfois celui de la carte a été remplacé par un champ de bananiers ou de canne à sucre. Beaucoup de soleil, pas de casquette et déjà lees intestins qui tournent dans le vide de manière douteuse.
Le soir arrivant, mon état se dégrade et on pense à une insolation. Car je suis un peu un habitué de ce mal. Nuit transpirante, rêves fiévreux et de nombreux passages aux toilettes me mène jusqu’au lundi matin. Les intestins ne vont pas beaucoup mieux mais le café du matin semble avoir calmé leurs appels. Se baigner en rivière en Haïti, bien que tentant relève un peu de la folie sachant ce qu’on peut contracter, comme la schistosomiase ou encore le choléra.
La nuit suivante se passe mieux et mardi matin je suis presque frais. Comme un autre matin, en somme. Le vendredi, je prends le super bus Paradise Tour qui fait Jérémie - Port-au-Prince dans des conditions acceptables. Acceptable signifiant qu’on est pas coincé entre une cage de poulets et un verrat en chaleur.
Le jour avant, début de toux et légère arthralgie. J’en profite pour ne rien de faire de trop, comme d’habitude, essayant d’être au mieux pour le voyage. Réveil à 4h00, départ du bus vers les 5h du matin et c’est parti pour 7h. de bonheur après la petite chanson chrétienne devant nous porter chance. Étant le seul blanc du car, le dernier entré aura le malheur de devoir venir à mes côtés.
Puis à Port-au-Prince, les céphalées se font de plus en plus fortes avec des douleurs dans les cervicales. En bon informaticien, je fais le tour de toutes les maladies pouvant être contractées sur place. Et la liste fait un peu peur. N’ayant pas de problèmes intestinaux, et Dr House guidant mon auto-diagnostique, le coupable semblerait être la fièvre Dengue. À suivre donc.
Ma visite devait également conduire à un entretien d’embauche pour un emploi en Haïti. Prenant les devants, nous nous organisons pour ouvrir un compte en banque chez Unibank. Un truc tout simple, d’épargne avec un petit livret permettant d’effectuer les retraits, comme on ne voit plus depuis longtemps. Et là, ô drame, ma signature est trop aléatoire. Entre mon passeport, mon permis de conduire et celles que je peux faire, ça varie trop. Du coup, on me demande d’en créer une nouvelle, pour la banque. Comme si mon passeport helvétique, ou la tronche dessus, était plus facile à falsifier que ma signature. Compte en banque ouvert, mais rendez-vous annulé. Irma approche.
Le danger annoncé étant plus présent à Port-au-Prince que dans la Grand’Anse où se trouve Jérémie, j’essaie de convaincre Hélène de rentrer avant l’arrivée d’Irma. Avec toutes les indications météorologiques que je trouve et autres plans du NOAA, je n’y parviens pas mais elle accepte quand même.
Elle accepte donc, un départ à 6h. devant nous faire arriver à 13h. à Jérémie. Et voilà qu’à peine sortis de la capitale, un résidu orageux se présente devant nous. Un coup de pluie, une crise de nerfs pensant que nous nous jetions dans la gueule du loup alors qu’Irma quittait à peine les îles du Vent (Leeward). Peu importe, trois heures de bouchons plus tard, nous revoilà à la guesthouse face à une journée belle et ensoleillée.
Finalement, Irma commencera son action sur Port-au-Prince jeudi dans la journée avec un peu de vent et de pluie. Le soir, la situation sera un peu plus agitée mais de manière très légère. Heureusement pour Haïti, Irma sera passée suffisamment au Nord pour éviter le véritable drame. Le précarité de tout, partout fait que le moindre incident peut prendre des proportions violentes.
Vendredi, journée mouillée mais normale. Un dernier passage au supermarché histoire de ramener de bonnes choses dans nos valises le lendemain matin. Finalement le trajet d’après l’ouragan aura été bien pire qu’aucun autre avant. Pluie, brouillard et eau ou terre sur les routes nous ont accompagné durant tout le trajet. Sans encombre, donc réussi.
Jérémie n’aura subit que de loin les effets d’Irma et la bonne nouvelle est que les gens, institutions comme les ONG semblaient bien plus préparées et proactives que dans d’autres lieux. Un second Matthew n’est pas envisageable pour la région, espérons que les esprits garderont en mémoire les bons réflexes à avoir pendant encore longtemps.
Du coup, nous avons pu reprendre nos balades et il semble y avoir plein de petits cabris fraîchement arrivées. Et c’est certainement la fièvre Dengue car j’ai eu une éruption cutanée dans le dos qui semble assez caractéristique. Mais heureusement rien de plus. Me voilà immunisé contre une des cinq variantes du virus avec le risque que le prochain soit plus violent, voire hémorragique.